No way to treat a child : L’action de DEI Belgique et de Dynamo International – Street Workers Network concernant la situation des enfants détenus en Palestine

Clément Tilly, stagiaire du Service Civil France à Dynamo International, a participé à la réunion organisée par Défense des Enfants International (DEI) Belgique, sur la présentation de « La situation des enfants détenus en Palestine » et sur le partenariat entre DEI et Dynamo International. Voici son article.

LA SITUATION DES ENFANTS DÉTENUS EN PALESTINE

Chaque année, les autorités militaires israéliennes enferment et poursuivent judiciairement 700 enfants palestiniens. Le système judiciaire militaire qui est en vigueur dans les territoires occupés a comme principale implication que les autorités législatives et judiciaires sont détenues par un chef militaire. Ni les lois, ni la façon dont elles sont appliquées ne sont soumises à un organe démocratique qui aurait un droit de regard sur celles-ci. C’est ainsi que tous les aspects de la vie des palestiniens sont régulés et contrôlés.
Ce système crée des décrets militaires particulièrement sévères à l’image de l’ordre 1651. Ce dernier fournit les bases légales pour l’arrestation et la détention de palestiniens et notamment la détention administrative qui peut avoir lieu pendant des périodes prolongées et sans procès. L’infraction de « lancée de pierre » peut par exemple être punie de 10 ans de prison d’après ce décret. Insulter « l’honneur d’un soldat », sans même que l’on sache ce que cela implique précisément, est sanctionné d’un an de détention. Le décret permet aux militaires d’arrêter tout individu à tout moment sans raison particulière. Les enfants de moins de douze ans ne peuvent pas être poursuivis judiciairement mais cela ne les empêche pas d’être détenus et interrogés parfois pendant plusieurs heures avant d’être relâchés. Ceux âgés de plus de douze ans en revanche peuvent être arrêtés et présentés devant un juge sur simple suspicion, ce qui veut dire qu’aucun contrôle n’est exercé sur ces arrestations. Par ailleurs, il est donc clair que le système judiciaire auquel sont livrés ces enfants est loin d’être indépendants des autorités militaires.
Lorsqu’ils sont arrêtés, les enfants sont alors détenus dans des prisons, souvent isolés et interrogés d’une façon qui s’apparente à de la torture pour le droit international, dans le seul but de leur arracher des aveux, qu’ils soient vrais ou inventés. Les enfants et leurs familles sont menacés, des noms leurs sont demandé (ce qui perpétue le cercle des arrestations de mineurs). Cependant, la plupart des enfants n’ont rien à se reprocher et ont été victimes de raids au milieu de la nuit, d’avantage coupable d’appartenir à des communautés situées non-loin d’infrastructure d’occupation (routes stratégiques, murs de séparation, checkpoints…) ou d’avoir été proches de lieux de manifestations que d’avoir commis des crimes. Au cours des arrestations, ces mineurs sont très souvent victimes de violences physiques ou verbales (mains attachés, yeux bandés…).
Dès leur arrestation, les jeunes palestiniens sont enfermés et ne peuvent pas être libérés sous caution alors même que c’est la norme sous le système judiciaire civil en Israël. Pire encore, ils ne peuvent pas voir leur famille, ni même un avocat, avant d’être déféré devant un juge, parfois jusqu’à 72 heures après leur rafle. En effet, la loi martial permet la détention d’enfants de 24 heures (pour les 12-13 ans) jusqu’à 72 heures (pour les 16-17 ans) avant un éventuel procès. Bien loin donc des 12 heures maximum autorisées par la justice en Israël.
L’exception devient donc la norme, et plus encore, lorsqu’il s’agit d’enfants issus des territoires occupés. Les enfants sont donc souvent détenus plusieurs mois (entre 6 et 9 mois en moyenne), parfois même avant que leur procès débute, et cela a évidemment des conséquences désastreuses sur leur développement et notamment sur leur éducation. La plupart du temps, ils seront condamnés à du sursis pour des délits imaginaire ou exagérés et devront entamer une période probatoire de 3 à 5 ans durant laquelle le moindre écart de conduite les mènera directement en prison. Ainsi, la politique de terreur menée à l’encontre des jeunes palestiniens à travers la loi martial touche à son but : exercer un contrôle par la peur sur ces enfants palestiniens, leurs familles et leurs communautés. Le système n’est donc pas défaillant, il fonctionne comme prévu.
Il est important de rappeler que les principes et normes du droit international veulent que la détention de mineurs soit une mesure de dernier recours et utilisé durant un laps de temps minimal. Or, la situation en Palestine est à l’exact opposé de ces recommandations depuis l’application de la loi martiale en 1997 lorsque l’armée israélienne a commencé à occuper la Cisjordanie et la Bande de Gaza.

L’action de DEI Belgique et de Dynamo International – Street Workers Network

En 2015, la campagne “No Way to Treat a Child” est née aux Etats-Unis sous l’impulsion d’activistes et avec l’aide de Défense des Enfants International (DEI). L’idée est de faire pression, à travers des campagnes de sensibilisation, sur le Congrès américain afin de faire de la question un point central de la politique envers Israël. Les États-Unis ont en effet une partie de leur budget extérieur allouée à un support militaire d’Israël. Il serait donc possible de faire passer une loi interdisant que l’aide financière américaine soit utilisée pour ce genre de pratiques, ce qui constituerait une avancée majeure. La campagne est aussi présente en Europe et tente d’influencer les institutions européennes ainsi que les acteurs de la société civile comme Dynamo International.
Dans ces sphères de décision, le but de la campagne est de mettre le sujet des droits de l’humain et des droits de l’enfant sur la table. Quand il en vient à la problématique Israël/Palestine, les discussions tournent plutôt autour de politique internationale comme le sujet de la solution des deux états. Plus rarement sont abordés les enfants enfermés et torturés, les violations des droits de l’humain qui sont commises dans les territoires occupés. Sur place, l’organisation vise aussi à former des avocats palestiniens sur les spécificités du droit de l’enfant.
Outre cela, la collaboration entre DEI Belgique, DEI Palestine et Dynamo International a donné lieu à un projet sur cinq ans, visant principalement à développer un environnement plus protecteur et respectueux de leurs droits pour les enfants palestiniens, à travers la création de « centres de défense socio-légale » (CDSL). Ces centres ont pour vocation de donner une assistance sociojuridique de qualité aux enfants et à leurs familles et ce en garantissant une approche participative centrée sur l’enfant et son intérêt supérieur. La pluridisciplinarité est aussi un aspect central des CDSL et des professionnels issus de différentes disciplines (droit, médecine, psychologie, travail de rue…) seront amenés à intervenir au sein de ces centres. Des activités de sensibilisation, d’aide à la réintégration sont aussi prévues. Dynamo International – Street Workers Network est lui partenaire dans le but de renforcer la dimension travail de rue du projet et de collaborer à la structuration d’une plateforme palestinienne des travailleurs de rue qui pourrait intégrer le réseau à terme.
L’objectif de l’action combinée de Dynamo International et de DEI est donc de provoquer des changements structurels dans le système de justice auquel les enfants palestiniens sont confrontés et d’assurer leurs droits face aux nombreuses dérives de ce système.
Pour plus d’informations : DEI Palestine, campagne “No Way to Treat a Child”, Défense des Enfants International
Clément Tilly, intern of the French Civil Service at Dynamo International, participated in the meeting organized by Defense of Children International (DEI) Belgium, on the presentation of «The situation of children detained in Palestine» and on the partnership between DEI and Dynamo International. Here is his article.